Ces fantômes bien connus en ordre dispersé, suivant des routes aléatoires, avançant sans cohésion, sans vision, qui n’ont pas d’appétit, ni d’envie, et ne vont pas accomplir grand-chose, cela ne vous rappelle rien ?
Et pourtant…
Mardi, 9h30 : Bip-Bip !
Votre smartphone vient de vous rappeler que vous avez un « atelier ». Encore un. Et il n’y a aucune raison pour qu’il soit différent des précédents…Péniblement, en vous demandant ce qu’il va bien sortir de tout cela avec ces méthodes d’un autre siècle, vous pensez déjà en chemin à votre occupation personnelle pendant la réunion : Réponses rapides et discrètes à quelques mails ? Revue de votre calendrier ? Mise à jour d’une ènième to do list ?ou simple gribouillage sur votre nouveau cahier à spirale ?
Allez c’est parti. D’une oreille distraite, il est encore question de passer en revue le précédent compte rendu de la réunion d’il y a 2 semaines, envoyé la veille.
Puis de traiter un point que personne ne maîtrise vraiment autour de la table.
Les décisions ? Chacun défend sa paroisse, son service, son département. « Faut que je valide avec Bob », « On verra ce point la prochaine fois »…
Au bout de l’assemblée d’une dizaine de membres (« on était plus nombreux la dernière fois »), « l’animateur », du fond de sa chaise, essaie de dynamiser, de rappeler les débats. Chacun se réfugie derrière son cahier/smartphone/PC, prend des notes, ou pas. Les idées ne manquent pas, mais sont bridées par l’appartenance de chacun à sa hiérarchie, à l’expression dans ce type de réunion. Enfin, on repart, en pensant déjà avec amertume au prochain atelier, car « il faut bien y aller ».
Et si on se faisait un peu confiance ?
Ces groupes transverses projet sont marqués par l’absence cruelle d’esprit d’équipe, qui peuvent a contrario animer certains départements. Pourquoi ?
D’abord, les membres de ces équipes ponctuelles se connaissent peu, et les liens tissés entre chacun sont encore plus complexes à discerner. Cette connaissance intra et inter personnelle est pourtant un prérequis à la cohésion et à un objectif commun qui ne soit pas qu’un mauvais compromis des orientations des différents services composant le groupe. A cela doit s’ajouter un désir de participer, de s’impliquer, dans le sens de la vision des transformations fixées, au-delà des querelles de baronnies que l’on peut retrouver ici ou là.
En revanche, là où le temps et la stabilité d’une équipe hiérarchique peut faire émerger ces caractéristiques, il est beaucoup plus difficile de les voir apparaître spontanément pour des groupes transverses se réunissant ponctuellement.
« On peut en savoir plus sur quelqu’un en une heure de jeu qu’en une année de conversation »
Cette citation, dont ne sait qui, et faussement attribué à Platon, a pourtant tout de la parole de sage.
Car le jeu est un formidable accélérateur de connaissance de l’autre.
Il permet d’apprécier les caractéristiques en terme de tactique, stratégie, fair play, prise de décision, de risques, inventivité, créativité, forces, faiblesses, de quelqu’un. On peut évoquer des jeux de plateau compétitifs ou coopératifs de différentes époques comme Diplomacy, Pandémie, Dixit ou encore Puerto Rico.
Par l’état de concentration total qu’ils peuvent procurer, comparable au « flow » observé chez certains musiciens, le jeu est aussi facteur d’immersion et d’engagement. Ne dit-on pas « Se prendre au jeu » ?
Les expériences de jeu proposant d’incarner un personnage, comme dans les jeux de rôle, sont suffisamment fortes pour que les moindres détails soient mémorables.
Et tout en proposant un cadre de règles à respecter, il procure également une part indéniable de fun. Alors, il serait peut-être temps que l’entreprise s’approprie ces mécanismes !
De la gamification individuelle à la gamification collective : de la motivation à la cohésion
La gamification se forge une place dans notre quotidien, du permis à points à la plupart des applications digitales : pour faire du sport (système de points, classements, progression) ou même pour contribuer à signaler des incidents de trafic dans certains GPS (badges, récompenses), il assure sa progression constante dans nos quotidiens en s’appuyant sur un public de plus en plus joueur. Il suffit d’observer le secteur des jeux videos, ou même la (re)naissance de celui des jeux de plateaux, longtemps cantonnés aux tristes Monopoly et autre Uno pour s’en rendre compte.
Dans les entreprises, ces principes de la gamification individuelle sont parfois utilisés dans les systèmes de rémunération, par exemple d’équipes commerciales, comme outil de motivation (Incentives).
La gamification collective, en introduisant subtilement les mécanismes de jeux collectifs dans nos modes de travail en équipe devrait accélérer l’engagement de chacun, la confiance au sein des équipes projet, puis la cohésion, moteur de la transformation. On peut le retrouver dans certaines méthodes projets (Scrum) mais encore trop timidement dans la plupart de nos organisations. Il ne s’agit pas de jouer artificiellement à un jeu sans adaptation, mais bien de comprendre et reproduire ses apports dans un contexte professionnel.
Au-delà de cela, c’est surtout l’envie collective d’accomplir ces changements, en échappant aux bien mal nommés « jeux »politiques crispants, que l’on peut viser en mettant en place ces pratiques, parmi d’autres.
Ce sont ces démarches que nous proposons de construire et que nous vous invitons à découvrir lors de nos rencontres et au fil de nos articles.
Efforçons nous donc pour accomplir les changements, d’échapper à nos fantômes, étriqués dans un labyrinthe étroit, sans cohésion, aux réflexes pavloviens, sans vision et surtout sans envie !